L'Aveugle, moi et Azurmendi
L'invitation de père Carron lors de la Journée du début de l’année, à redecouvrir une fidélité à l'événement à travers l'exemple de deux témoins, a guidé le père John durant les mois de la pandémieEn cette période mystérieuse de la pandémie mondiale, nous avons été plongés dans des circonstances nouvelles, imprévues et restrictives qui nous ont obligés à faire face au néant qui domine souvent nos vies et nos façons de voir le monde et nous-mêmes.
Depuis la présentation de la Journée du début de l’année « On ne voit que ce que l’on admire », j'ai été profondément ému par le travail que le père Julian Carrón m'a invité à faire pour m'aider à affronter la réalité telle qu'elle se présente à moi dans ces nouvelles circonstances. Lors de cet événement, le père Carrón nous a invités à regarder et à reconnaître l'œuvre de Dieu dans la vie de deux témoins: l'homme né aveugle dans l'Évangile de Jean et l'anthropologue espagnol Mikel Azurmendi. Je veux partager ici pourquoi ces deux témoins m'ont été si utiles pour comprendre la méthode que Dieu utilise pour me réveiller du sommeil et de la distraction du néant.
Premièrement, le père Carrón a souligné à travers ces deux témoins l'importance de regarder les faits de notre vie pour apprendre à faire face à la tentation commune de succomber au nihilisme, qu'il a décrit comme étant une « intimité avec le néant ».
Père Carrón a présenté l'histoire biblique de l'aveugle né et de sa guérison miraculeuse par Jésus comme l’exemple principal de cette fidélité aux faits. Il écrit dans l'introduction: « Un homme né aveugle qui acquiert la vue est un événement. « Avant, je ne pouvais pas voir, et maintenant je vois” il a répété encore et encore. Cet homme était si sûr de son expérience, de pouvoir voir, que les différentes interprétations des chefs religieux ne l'ont pas ému du tout. Cette interprétation de la fidélité de l’aveugle à ce qui s’est passé dans sa vie a été très utile pour discerner la relation entre le fait de suivre la réalité et la foi. Père Carrón a souligné qu’avant tout, l'aveugle adhérait à la réalité: « D'abord, je ne pouvais pas voir, et maintenant je vois ». Ce n'est qu'après cela qu'il en est venu à reconnaître Jésus et à croire en Lui.
Père Carrón a souhaité partager le témoignage de Mikel Azurmendi avec tout le mouvement après avoir été ému en voyant la vidéo sur lui au Meeting de Rimini l'été dernier. Il a expliqué comment ce témoin «documente comment en ces temps de nihilisme, une personne peut reconnaître une expérience qui est différente lorsqu'elle a lieu. Une personne peut voir une différence, quelque chose qui n'est pas du nihilisme, et peut être étonnée de voir le nihilisme vaincu simplement en suivant l'évidence initiale de cette différence.
Dans le deuxième témoignage, Mikel Azurmendi a raconté l'histoire de sa rencontre avec Fernando de Haro en écoutant son émission de radio à l'hôpital. La façon dont Fernando parlait et regardait la vie suscitait en Mikel admiration et émerveillement. Cela a incité Mikel à entamer un voyage d'amitié avec lui et à découvrir la communauté de foi à laquelle appartenait Fernando.
Grâce à un travail de vérification qui impliquait de rencontrer des écoles et des œuvres caritatives, ainsi que des familles et des groupes de fraternité associés à la communauté chrétienne, Mikel fut finalement amené à croire au Christ. Comment Mikel est-il arrivé à croire en Jésus? C'est à travers la vie qu'il a été présenté. « Il n'y a qu'une seule explication à ce fait, que ce qu'ils vous disent est vrai; que la vérité est vraiment la vérité en action », explique Mikel.
En réfléchissant à toutes les personnes et initiatives qu'il a rencontrées, il ajoute: « La vérité produit la vie. Ce style de vie est produit par quelque chose: ils disent que c'est Jésus-Christ. […] Et ce n’est pas seulement que Jésus l’a dit, c’est que ce sont ces gens qui le vivent. Alors, vous mettez deux et deux ensemble, et vous dites: « Je dois y croire; c’est le Jésus vivant en qui je crois. »
Dans sa conclusion de la Journée du début de l’année, le père Carrón a invité chacun de nous à vérifier personnellement l'hypothèse selon laquelle c’est un événement qui nous fait sortir du néant qui domine nos vies. Il nous a invités à faire la même vérification que les deux témoins.
Plus concrètement, il nous a invité à prêter attention et à reconnaître tout ce que nous vivons, même les moments difficiles où nous sommes alourdis par la distraction et l'intimité avec le néant. Nous devons apprendre à aimer et à accepter la fragilité de notre humanité car c'est le lieu privilégié où se passe l'événement du Christ qui nous permet de le voir et d'adhérer à Lui.
À travers les faits inattendus qui suscitent l'émerveillement (et la douleur) dans nos vies, nous sommes invités à vérifier que la rencontre avec le Christ touche et embrasse vraiment les aspirations les plus profondes de nos cœurs. Ce n'est qu'à travers la vérification personnelle de ces événements, et de la manière dont ils brûlent nos cœurs, qu'il est possible de croire raisonnablement que le Christ est toujours présent et intéressant pour nos vies aujourd'hui.
Que me disent ces deux témoins emblématiques et leur interprétation par le père Carron de la méthode que Dieu utilise pour éveiller mon cœur ?
Tout d'abord, tout comme dans l'expérience de l'aveugle, il y a dans ma vie un moment très identifiable où « auparavant je ne voyais pas et maintenant je vois ». L'initiative de Dieu a pris place dans les circonstances concrètes de ma vie et je peux avoir confiance qu'elle continuera à se passer de la même manière. Cela signifie que je n'ai pas besoin de chercher ailleurs ou d'essayer de changer ma situation donnée pour trouver le Mystère.
Pour vérifier adéquatement l'hypothèse selon laquelle le père Carrón m'invite à vivre, j'ai besoin d'une ouverture et d'une tendresse envers les circonstances données et concrètes de ma vie. J'apprends à accepter avec tendresse mon propre aveuglement et mon intimité avec le néant, les distractions par lesquelles j'essaye de combler mon besoin de sens, de vérité et d'épanouissement.
Je suis invité à faire plus attention à ce qui se passe chez moi et avec les gens qui m'entourent quotidiennement en ces temps de restrictions accrues.
Deuxièmement, la méthode que le père Carrón a indiquée me rappelle que je ne peux pas me sauver moi-même. Seul le Christ peut me sauver. C'est son initiative. Je ne peux pas me sauver par mes propres efforts; je ne peux échapper par moi-même au nihilisme que je respire chaque jour. Il n'y a pas de lunettes spéciales que je puisse mettre pour me permettre de voir et de reconnaître le Mystère. Ce n'est pas quelque chose de magique ou d'automatique.
L’initiative du Christ me vient à travers la communauté chrétienne qui m’entoure. L'un des plus beaux aspects du charisme de Communion et de la Libération est l'expérience de l'amitié. En suivant ce charisme, j'ai reçu une amitié réelle et de nombreux pères et témoins spirituels qui me génèrent. Tout au long de cette période difficile de la pandémie, j'ai pris davantage conscience de mon besoin de suivre ces amis. En suivant, j'apprends de plus en plus pour voir et reconnaître Son œuvre dans ma propre vie et dans la vie de mes amis.
Enfin, j'ai constamment entendu au cours de ces mois que les changements provoqués par la pandémie ont rendu presque impossible de vivre la foi. Cependant, le rappel à la méthode par père Carron me rappelle qu’il n’est pas ainsi. Je n'ai pas à changer les circonstances de ma vie pour permettre au Seigneur de me rencontrer et de m'éveiller. La pandémie ne limite ni ne change la méthode de Dieu.
Un exemple concret que j'ai entendu de quelques amis en décembre dernier était le fait que la célébration de Noël allait être presque impossible avec les églises fermées, une fréquentation limitée et pas de chants de Noël ou de rassemblements avec des amis et avec la famille élargie. Je me suis rendu compte que pour ces amis, la venue de Jésus au monde avait été limitée et réduite à ces manières traditionnelles de célébrer. Ce qui m’a frappé, c'est l'impossibilité de penser à de nouvelles façons dont la Parole pourrait devenir chair durant une pandémie mondiale. J'ai pensé que si Jésus pouvait venir au monde dans une étable à Bethléem il y a deux mille ans, pourquoi ne pourrait-il pas se faire chair dans une maison en confinement en 2020.
La méthode de Dieu est de nous atteindre à travers des événements surprenants afin de nous convaincre de sa contemporanéité et de sa proximité avec nos vies. Il va toujours prendre l'initiative, pour essayer de nous éveiller dans le vif du sujet de notre vie quotidienne. Nous devons constamment surmonter la tentation commune de limiter ou d'imposer à Dieu la voie par laquelle il veut nous sauver.
Chaque jour, je demande la grâce d'identifier et de personnaliser de plus en plus les expériences de l'aveugle et de Azurmendi. J'ai un besoin brûlant de me souvenir et de supplier que cette expérience se produise dans ma vie.
Père John Roderick, St-John NB