Le pont de San Luis Rey
Pages: 128
Écrit en 1927 avec « la sécheresse des auteurs conscients de la cohérence du matériau narratif » à tel point qu'Indro Montanelli a pris cette richesse de contenu alliée à la fraîcheur de la langue comme modèle d'écriture pour ses journalistes.
L'idée qui sous-tend l'intrigue est éblouissante : un jour du début du XVIIIe siècle, le plus beau pont de tout le Pérou sur la route entre Lima et Cuzco, tressé par les Incas avec des branches d'osier, s'est rompu. Cinq personnes le traversaient à ce moment-là, toutes sont mortes. Comme tous les habitants du monde des morts, ils ont rapidement sombré dans l'oubli ordinaire, à l'exception du témoin oculaire de la catastrophe.
C'était un vieux moine optimiste, Fra' Ginepro, convaincu de la coïncidence et de l'identité entre la réalité et le bien, prêt à professer à ses fidèles que tout est pour le bien. Et ce « pur acte de Dieu », la coupure du pont, pouvait être l'occasion d'une démonstration « mathématique » : « s'il y a un dessein précis à la base de l'univers, on peut le découvrir dans ces vies si brusquement interrompues ».
C'est ainsi que « naquit en lui la décision qui l'occupa pendant six ans » : enquêter sur la vie de ces cinq victimes, démontrer la justice de Dieu à travers leur vie, « répertorier des milliers d'épisodes, d'anecdotes et de témoignages ».
Et aussi éblouissante que soit l'idée de l'intrigue, la question qui sous-tend la recherche de Fra' Ginepro est en réalité la question des questions : « Ou bien nous vivons par hasard, et par hasard nous mourons ; ou bien nous vivons selon un plan, et selon un plan nous mourons ».